La situation de l’économie sociale et solidaire hongroise est celle d’un embryon, sous-développé par rapport aux pays d’Europe occidentale. La raison en est que, tandis que dans les pays de l’Ouest le mouvement coopératif a toujours été une réaction ou un mécanisme de défense contre le paupérisme et le système économique libéral, et il est encore considéré aujourd’hui comme une forme très progressiste d’organisation de la production et du processus de consommation, en Hongrie le coopérativisme forcée des années socialistes a été suivi d’une réaction contre celui-ci avec la chute du régime. Même aujourd’hui, il y a des perceptions très négatives liées au concept des coopératives. Cela est particulièrement vrai dans les zones rurales et pour les coopératives agricoles. Avant 1989, environ 14,2% de la terre agricole a été détenue par des propriétaires privés, 14,9% par l’Etat, et 70,9% (environ 5,7 millions d’ha.) était détenue par les coopératives. Après les changements politiques qui se sont produits dans les années 90 plus de 5,1 millions d’ha. de terres arables et de forêts ont été privatisés, créant environ 2,6 millions de nouvelles parcelles et un nombre estimé de 1,8 millions de nouveaux propriétaires. Mais il y a seulement 50.000 agriculteurs en Hongrie avec une superficie suffisante pour vivre des cultures. Un grand nombre de coopératives agricoles a été liquidé, ce qui a entraîné une diminution de la production, aggravée par la perte des marchés socialistes et un chômage important dans les zones rurales. L’économie sociale et solidaire hongroise est dominée par les coopératives dites sociales. Ce sont des coopératives, formées d’au moins 7 membres, dont l’activité principale consiste à créer des possibilités d’emploi pour les personnes défavorisées. Elles sont considérées comme des entreprises à but lucratif par la loi sur les coopératives ainsi que d’autres règlements connexes (droit comptable, lois fiscales, etc.). La plupart d’entre elles sont, ou ont été à un moment donné, subventionnées par des fonds publics. Cependant, même les coopératives sociales qui ont reçu des subventions importantes provenant des budgets nationaux et de l’UE pour leur lancement se plaignent d’être laissées seules, et leur viabilité à long terme ne semble pas être assurée. Les principales activités des coopératives sociales sont les suivantes: sous-traitance des services publics locaux (jardinage, nettoyage, entretien d’aires de jeux), services fournis à la collectivité locale (services de blanchisserie, ménage et entretien de jardin, transport vers le travail); soins aux personnes âgées; garde d’enfants (garderie familiale, services de nounou, programmes de divertissements, clubs, activités artisanales, grande variété de camps d’été); la production artisanale traditionnelle, la production de produits alimentaires (confitures, sirops, fruits secs, huile de pépins de courge et de tournesol), les activités de l’industrie du bois (menuiserie, production de mobilier d’extérieur, collecte des déchets de production agricole et du bois, production de biomasse et biobriquet), la construction, ou les épiceries sociales. Et c’est dans leur double dimension, économique et sociale qu’elles obtiennent leur légitimité: elles sont conçues pour obtenir des résultats économiques tout en employant des personnes défavorisées. Pol Vidal Secrétaire exécutif du RIPESS-Europe