par Judith Hitchman (Urgenci)

Habitat III, antérieurement la Conférence des Nations Unies pour un Habitat et des Villes Durables, est un processus dont le déroulement s’est fait tous les 20 ans, en 1976, 1996 et cette année en 2016. Comme tous les processus des Nations Unies aujourd’hui, il s’agit là d’une consultation et les organisations de la société civile sont à même de jouer un rôle majeur dans l’élaboration de l’agenda. Plusieurs consultations thématiques ont pris place dans le monde entier au cours de cette année. Le texte et sa mise en place sont très largement liés aux ODDs (Objectifs de Développement Durable), le liant ainsi plus étroitement au processus plus large des Nations Unies. En effet, il n’est pas relié à une agence spécifique des Nations Unies mais implique plutôt de nombreuses agences de par sa nature transversale. Pour en savoir plus sur le processus préparatoire, consulter: https://habitat3.org/preparatory-process

L’économie solidaire est extrêmement pertinente dans le contexte des mégalopoles et peut jouer un rôle vital en termes d’inclusion sociale, autogouvernance et empowerment de la société civile, ainsi que clairement dans la transformation du paradigme néolibéral qui prévaut aujourd’hui.

Le RIPESS s’est vu impliqué dans un processus de contributions à deux niveaux au cours des 9 derniers mois. Le premier, par l’intermédiaire de la UN Task Force sur l’Economie Sociale et Solidaire (UNTFSSE), dans laquelle nous jouissons du statut d’observateur et où nous avons collaboré à l’élaboration d’un texte sur l’ESS. Ce texte a été soumis au Secrétariat d’HIII, signé conjointement par la UNTFSSE, Les Rencontres du Mont-Blanc, Habitat International Coalition (HIC) et la Global Platform for the Right to the City (GPR2C) qui a coordonné et été à la tête d’une importante partie des contributions et des négociations de la société civile au nom des organisations de la société civile qui travaillent au sein du GPR2C. Le deuxième niveau de contributions s’est réalisé par l’introduction d’apports en profondeur au texte même du Nouvel Agenda Urbain HIII lors des différentes étapes du processus, en travaillant au sein du GPR2C. Cette contribution détaillée au texte concerne tant l’approche de l’économie solidaire que celle de la souveraineté alimentaire. Il est à remarquer que la HIC, le GPR2C et Urgenci bénéficient tous de l’appui de la FPH (Fondation Charles Léopold Meyer)

La contribution initiale a obtenu l’appui du FMDV (Fond Mondial pour le Développement), qui a invité et appuyé financièrement le RIPESS pour qu’il participe à l’une des première consultations – spécifiquement sur la finance – à Mexico en mars 2016. Cela est très significatif car les Community Land Trusts (CLTs) peuvent être utilisés tant au niveau urbain que rural: dans un contexte urbain ils aident à garantir des coopératives de logements et à éviter la spéculation immobilière. Dans un contexte territorial plus ample, ils aident aussi à éviter la spéculation sur des terres agricoles, permettant ainsi de garantir la souveraineté alimentaire et la sécurité alimentaire. Les Community Land Trusts ont été mentionnés dans la Déclaration Finale à Mexico.

L’alimentation était à l’origine une question largement négligée dans les premières versions des textes d’HIII. Etant donné que l’alimentation des villes est désormais une préoccupation majeure des ODDs, – de même que la gestion du changement climatique – , il était extrêmement important de contribuer par nos connaissances spécifiques et renforcer encore le lien avec le travail que nous avons réalisé sur les ODDS au sein du Mécanisme de la Société Civile du Comité sur la Sécurité Alimentaire et la Nutrition, ainsi qu’en assurant que l’alimentation soit liée tant à la souveraineté alimentaire qu’aux questions d’économie solidaire. Lors de la consultation de la FAO avec la Société Civile en Europe et en Asie Centrale, les ODD12 et 13 sur la production et la consommation responsable ont été mis en avant par la société civile car jugés essentiels pour atteindre l’ODD2, à savoir en finir avec la faim dans le monde. Dans le cas du Nouvel Agenda Urbain, il est aussi pertinent d’ajouter l’ODD11.

La participation suivante au processus a été Barcelone où la thématique de la consultation concernait les espaces publics. La plateforme du GPR2C a tenu une réunion préliminaire, dans laquelle le RIPESS a été invité à participer. Plusieurs membres du RIPESS Europe ont rejoint la consultation, mais aussi d’Urgenci, du DESC (un membre de la XES) et de la HIC, mettant l’accent à nouveau sur l’économie solidaire et les questions relatives à l’alimentation. Laure Jongejans, la nouvelle secrétaire opérationnelle du Ripess Intercontinental, y a aussi pris part. Et comme, cela se passait relativement près de son lieu de résidence, Judith a eu la flexibilité de pouvoir rester à Barcelone pour la consultation HIII elle-même, et a même participé au comité éditorial de la Déclaration Finale. La réunion de Barcelone a été très importante pour le RIPESS, car c’est là que s’est consolidé l’alliance avec R2C et que la contribution en profondeur au Nouvel Agenda Urbain a démarré.

Il y a eu plusieurs versions du texte actuel. A chaque étape après la réunion de Barcelone, le RIPESS a soumis des modifications et des ajouts à la version proposée, principalement sur les questions liées à l’alimentation mais aussi par exemple liées aux achats publics solidaires, en travaillant de façon collective à travers la plateforme de R2C. Il s’est agit d’un processus de négociations, de va-et-vient entre les Etats et la société civile, avec un travail très dur et très réussi réalisé par la plateforme GPR2C, en particulier grâce aux excellents talents de négociateur de Nelson Saule et Lorena Zarate. La seconde dernière version était largement basée sur des concepts de droit à la spéculation et un agenda très néolibéral. Heureusement, il a été possible de détourner une part importante de ce langage et que le document finalisé NAU reflète les positions collectives de la société civile. Il est possible de le télécharger au lien suivant: https://habitat3.org/the-new-urban-agenda.

Le NAU sera voté et entrera en application lors de la réunion HIII de Quito. De nombreux membres de RIPESS LAC seront présents et porteront notre message collectif lors de plusieurs événements parallèles. Ce qu’il reste à faire: diffuser les contenus du Nouvel Agenda Urbain, participer au processus de mise en place et s’assurer que toutes les villes et les autres établissements humains mettent pleinement en oeuvre ses contenus à notre satisfaction. Cela fournira un levier important pour la société civile pour s’assurer que tant l’économie solidaire que la souveraineté alimentaire soient directement partie intégrante de l’agenda.