Participation de RIPESS/Urgenci à la Rencontre Européenne de la Plateforme Globale pour le Droit à la Ville et à la Consultation Habitat III sur les Espaces Publics à Barcelone, du 2 au 5 avril 2016
Lors de la rencontre sur Habitat III à Mexico, le Ripess a participé à une session dédiée à l’Economie Sociale et Solidaire. Cela nous a aussi aidés à progresser dans de nombreuses discussions. RIPESS, en tant que mouvement relié d’économie solidaire participe à la promotion d’un changement global de paradigme économique et à la mise en place d’une économie basée sur les droits humains ancrée dans des concepts tels que la justice sociale : celle-ci se base sur l’obtention de revenus justes pour les producteurs et à des prix accessibles pour les consommateurs, mais aussi sur la “démarchandisation” du système économique (en particulier dans ses aspects fondamentaux: l’alimentation, le logement, la santé, l’éducation, l’énergie et les autres services publics essentiels) et oeuvre en faveur d’une approche centrée sur la communauté pour leur gestion collective.
Urgenci, en tant que réseau de l’Agriculture Soutenue par la Communauté (Community-supported Agriculture – CSA) est un participant actif du mouvement global de la souveraineté alimentaire et est membre du RIPESS. Nous avons pris en ce sens pour une grande part la responsabilité d’assurer que l’idée de systèmes alimentaires territoriaux fasse partie de la vision en cours d’inclure l’alimentation dans les éléments mis en avant tant dans le R2C (Droit à la Ville – Right to the City) que dans les conversations d’Habitat III. C’est d’autant plus important qu‘on estime que l’agriculture urbaine est capable de nourrir à peine 20% des principales mégapoles du monde. La préservation des terres cultivables péri-urbaines pour une production alimentaire à petite échelle – en particulier, les partenariats locaux solidaires entre producteurs et consommateurs (PLS), les jardins communautaires, les jardins partagés etc – est essentielle. L’utilisation des Organismes Fonciers Solidaires (Community Land Trusts) est un important levier pour s’assurer que ces terres soient protégées de manière durable contre la spéculation, et les Directives Volontaires sur les Régimes Fonciers applicables aux terres, aux pêches et aux forêts, – élaborée par le CFS (Comitreliéé des Nations Unies pour la Sécurité Alimentaire) avec un fort apport de la Société Civile par l’intermédiaire du CSM (Mécanisme de la Société Civile) – sont des éléments clés. Aussi bien les PLS que les Organismes Fonciers Solidaires sont mentionnés dans la déclaration finale de la consultation sur la finance d’Habitat III de Mexico, et le besoin d’une Economie Sociale et Solidaire en tant qu’approche globale et la préservation des terres publiques de la spéculation et leur utilisation pour la production d’aliments dans les zones péri-urbaines sont clairement mentionnées dans la Déclaration de Barcelone, ainsi que l’approche globale des droits de l’Homme.
La XES, en tant que plateforme locale de l’Economie Solidaire et membre du Ripess Europe était aussi très bien représentée pour la promotion et le partage des ces éléments, à la fois par son directeur et de nombreux membres présents dans le R2C et les rencontres officielles d’Habitat III à Barcelone.
Lors de la rencontre du R2C, deux membres d’Urgenci ont participé à un atelier sur les questions alimentaires : Isa Alvarez de Nekaserea au Pays Basque. Nekasarea est aussi membres du REAS, le réseau espagnol d’Economie Solidaire qui fait partie du RIPESS. Emily Mattheison de FIAN, le réseau mondial du Droit à l’Alimentation, Laia Fargas Fursa du DESC, l’Observatoire Catalan des Droits Economiques, Sociaux et Culturels, et également membre de la XES ainsi que moi-même, en tant que présidente du réseau Urgenci, avons participé, ainsi que de nombreux autres. Parmi les conclusions des ateliers dans lesquels nous étions présents, il a été noté que les Districts d’Economie Solidaire (DES) en Italie peuvent aider à fournir une réponse conjointe face à l’économie néolibérale. L’ESS nous permet de construire des alternatives positives de toutes sortes pour réclamer les Communs. Ces alternatives nécessitent un changement d’échelle dans le sens de l’expansion plutôt de que la croissance (une multiplication de nombreuses petites initiatives connectées au niveau local, régional, national et international avec une gouvernance du bas vers le haut, plutôt que la recréation d’initiatives à grande échelle gérées de haut en bas). Cela implique des luttes et d’exercer une pression pour s’assurer que nos droits historiques soient respectés et pose la question de la connexion avec les institutions. Les Etats sont devenus très inefficaces pour assurer le respect des droits économiques, sociaux et culturels mais il est possible de travailler à la fois au niveau des Nations Unies et des Autorités Locales pour atteindre ces objectifs. L’ESS, en tant qu’approche de changement de paradigme économique systémique et transversale peut apporter des réponses pour transformer les villes en espaces plus inclusifs. Habitat III devrait travailler plus en profondeur avec d’autres agences des Nations Unies étant donné que de nombreuses thématiques transversales ne sont pas prises en compte de manière holistique (L’OIT et la FAO en particulier, sur le thème du travail et de l’alimentation).
En ce qui concerne les aspects plus spécifiques du droit à l’alimentation et à la construction de systèmes alimentaires véritablement alternatifs et la mise en application de la souveraineté alimentaire, la mise en place de Comités Locaux de Politiques alimentaires contribue à une forme de cohérence vers une gouvernance participative des systèmes alimentaires territoriaux. Le Pacte de Milan sur les politiques alimentaires en milieu urbain (Milan Urban Food Policy Pact) pourrait être l’un des moyens qui permettraient d’atteindre de tels résultats, mais des indicateurs doivent encore être formulés de manière à ce que les résultats puissent être vérifiés concrètement. Il est aussi important de permettre aux petits producteurs d’avoir accès aux villes grâce à des infrastructures adéquates, que ce soit en termes de routes, de marchés fermiers ou d’autres aspects. Le travail effectué actuellement sur les politiques dans le cadre du CFS est particulièrement important.
En conclusion, il est impossible de transformer la gestion non durable des villes en une gestion plus durable simplement en s’attachant aux détails sans changer les aspects fondamentaux de la gouvernance du foncier et de la propriété et les droits au logement, à l’alimentation, à l’éducation et à la justice sociale, économique et culturelle. Pour la Plateforme du Droit à la Ville où la réappropriation des espaces publics implique la justice sociale et les droits de l’Homme, ceci est en totale harmonie avec l’approche basée sur les droits du RIPESS.
Et comme le droit à l’alimentation est aussi central pour Urgenci et le mouvement pour la souveraineté alimentaire et les PLS représentent l’un des leviers essentiels pour nourrir les villes et élaborer des systèmes alimentaires territoriaux qui freinent le changement climatique, nous avons été heureux de participer à ces réunions et d’apporter notre petite contribution.
L’extraordinaire dynamique des membres nouvellement élus de la Municipalité de Barcelone était perceptible à tous les moments de la rencontre, et a représenté une véritable source d’inspiration pour toutes les personnes présentes. Nous espérons que la voie ouverte par Ada Colau et ses collègues nous mènera tous ensemble vers une approche véritablement durable des espaces publics et des Communs!
Judith Hitchman, 14 avril 2016