Article de El Salto Diario, par Aurora Báez Boza 1 octobre 2023

Ce samedi 30 septembre 2023, des milliers de personnes ont manifesté dans les rues de Grenade pour réclamer une Europe « antiraciste, anticapitaliste, écologiste et féministe » quelques jours après l’arrivée des représentant.es de la Communauté européenne. Le rassemblement, sous le slogan « Une autre Europe est possible », a eu lieu dans le contexte du Sommet social de Grenade qui, depuis le 23 septembre dernier, revendique « d’autres politiques européennes qui placent la vie des gens et de la planète au centre », selon ses organisateurs.

Les dizaines de groupes qui composent le Sommet social ont montré leur rejet des différentes politiques européennes qu’ils considèrent comme « capitalistes et génératrices d’inégalités ». Quelques jours avant l’arrivée des dirigeants européens, depuis le sommet, ils et elles maintiennent  leur position de générer un discours alternatif au modèle représenté par le sommet de l’Alhambra : « Nous voulons modeler l’Europe comme une terre de liberté et de justice, accueillante et ouverte au Sud global et porte-drapeau antimilitariste du Non à la guerre ».

Les manifestant.es ont concentré leurs revendications contre les politiques migratoires européennes, l’inaction face à la crise climatique et la signature d’accords commerciaux qui représentent une offense à divers territoires, comme le nouvel accord commercial UE-Mercasur. Ce dernier est un pacte commercial qui stimulera l’activité économique entre l’UE et l’Amérique latine, c’est-à-dire, selon des sources officielles, qu’il permettrait à la Communauté européenne d’avoir des accords avec 94% du PIB de l’Amérique latine, ce qui, pour des espaces de pensée néolibérale tels que le Groupe de réflexion L’Institut royal Elcano est « une opportunité transcendantale pour les deux régions d’approfondir leur coopération et leur engagement ». Les groupes environnementaux et les groupes de défense des droits de l’homme, cependant, appellent cela une aberration.

Le rapport sur cet accord commercial des Amis de la Terre indique qu’il «met en vente les gens, la santé et la planète». Andrés Muñoz Rico, responsable de la souveraineté alimentaire aux Amis de la Terre, ajoute : « Cet accord commercial va accélérer l’expansion de l’élevage industriel dans notre pays, un modèle extrêmement prédateur de ressources en eau dans un contexte de sécheresse. Il stimulera également la production de monocultures telles que le soja, la canne à sucre ou le bœuf dans les pays du Mercosur. Cela est contraire au règlement anti-déforestation adopté par l’UE. La semaine prochaine les négociations entre les parties reprendront à Bâle (Suisse) après plusieurs semaines d’arrêt, l’objectif des parties étant de conclure l’accord d’ici fin 2023.

Cet accord est l’un des exemples des politiques européennes contre lesquelles divers groupes sociaux et environnementaux se rebellent ces jours-ci à Grenade. Depuis Ecologistas en Acción, Helios Escalante Moreno a exposé à partir de la manifestation le rôle des mouvements sociaux pour promouvoir des alternatives « qui confrontent les politiques promues par les États et l’UE ». Il considère que « ces politiques approfondissent la privatisation et la perte des droits sociaux ainsi que les inégalités économiques obscènes, au niveau national et international ». Il souligne également que « la politique étrangère raciste et néocoloniale de l’UE, dont les mesures de contrôle des migrations coûtent la vie à des milliers de personnes en Méditerranée chaque année, exploite les ressources des pays du Sud ».

[…] La réunion de la Communauté politique européenne, événement central de cette présidence espagnole de l’Europe, réunira plus de 40 chefs d’État et de gouvernement les 5 et 6 octobre. Pour ce faire, l’Alhambra sera fermée pendant trois jours aux visites du grand public et disposera d’une force de police de plus de 900 agents dans toute la ville. Au cours de ces jours, les yeux de la politique internationale seront tournés vers la ville nasride, puisque la guerre en Ukraine, le conflit entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie et l’élargissement possible du projet européen à de nouveaux membres seront discutés, entre autres sujets. La présidence espagnole du Conseil de l’Union européenne a rejeté la demande d’accréditation d’El Salto Diario pour le sommet de l’Alhambra « pour des raisons de sécurité pour la réunion ».