Article de Georgia Bekridaki, Dock, Grèce
Ces dernières années en Europe, les violations des droits humains, sociaux et politiques fondamentaux se sont multipliées. Les crises économiques répétées causées par le néolibéralisme conduisent la société civile à organiser son action collective par le biais de manifestations, qui sont désormais trop souvent interdites soit par la loi, soit par l’utilisation asymétrique de la violence par les forces répressives de l’État, remettant en cause le droit de manifester garanti par la Constitution.
La migration des populations en provenance de zones de guerre ou de zones dangereuses est également réprimée, puisque des clôtures sont érigées à l’entrée des frontières européennes et qu’en mer les réfugiés sont repoussés par des retours illégaux, ce qui porte atteinte au droit humain fondamental à la sécurité et à la liberté de circulation. La crise du logement et l’augmentation des prix de l’immobilier dans les capitales européennes ont déplacé la population locale au profit de la spéculation immobilière et de l’industrie du tourisme de masse. La fermeture des biens communs et des services publics (espaces publics, éducation, services de santé, terres agricoles et semences), en particulier pour les citoyen.nes vulnérables et handicapé.es, s’intensifie et l’accès aux moyens d’assurer notre alimentation et nos moyens de subsistance a été restreint.
Qui a peur des droits sociaux et politiques et pourquoi sont-ils menacés ?
Pourquoi les organisations de la société civile, les militant.es et les intellectuel.les tirent-ils la sonnette d’alarme pour défendre les droits humains ?
Le fait est qu’à mesure que les inégalités s’intensifient, le contrôle social est légitimé au nom de diverses “crises” et de la création d’exceptions en matière de droits humains La démocratie, l’espace public où se déroulent les délibérations des citoyen.nes et où les gens deviennent des citoyens actifs, est constamment réduite : les initiatives des mouvements sociaux et de l’économie sociale et solidaire qui “créent” principalement des espaces de démocratie économique et promeuvent le multiculturalisme et l’inclusion tentent d’agir comme une barrière à ces développements négatifs.
L’économie sociale et solidaire (ESS), en tant que mouvement socio-économique, promeut l’approfondissement et l’élargissement des droits humains car, outre la production de biens et de services au bénéfice du plus grand nombre, elle vise à éliminer les inégalités sociales et à renforcer la participation des citoyen.nes aux décisions politiques. Dans le même temps, les actrices et acteurs de l’ESS accompagnent les mouvements sociaux traditionnels qui luttent pour les droits civiques et soutiennent leurs actions et leurs revendications.
La Caisse commune de l’alimentation Montpellier, en France, en est un exemple. Elle lutte contre l’insécurité alimentaire et soutient des projets d’accès à une alimentation durable et de qualité. L’ESS accompagne également des mouvements tels que la Coalition européenne d’action pour le droit au logement et à la ville qui, par le biais de manifestations et d’actions publiques dans plusieurs villes d’Europe, s’auto-organisent pour changer les politiques de logement. Elle contribue également au débat public sur le danger de la privatisation des biens communs de base tels que les infrastructures publiques d’approvisionnement en eau. En outre, les entreprises d’économie sociale et solidaire agissent non seulement d’une manière plus mutuelle et plus équitable, mais elles offrent également une perspective différente de la perception établie des questions sociales. Par exemple, Habibi.works, dont les services s’adressent aux migrant.es en tant qu’individus ayant des droits, une dignité et des possibilités, ou l’initiative Cooperativa de Iniciativa Social Gure Sustraiak, qui initie les personnes handicapées à la permaculture et les forme pour qu’elles deviennent elles-mêmes instructrices, changeant ainsi le regard des gens sur le handicap.
Pour défendre leurs droits, les citoyen.nes doivent combiner la résistance avec un rejet explicite des mesures autoritaires, tout en créant des exemples et en démontrant ce qui peut être réalisé collectivement pour le bien commun.