Proposition de contribution par Constance André-Aigret, Mouvement Sol

L’impact des monnaies locales complémentaires sur le territoire et sa résilience

En tant qu’acteur de l’économie sociale et solidaire, le Mouvement Sol1 (membre du RIPESS) accompagné d’acteurs européens et nationaux, propose d’organiser une table ronde sur l’impact des monnaies locales complémentaires (MLC) sur le territoire et sur sa résilience, avec le RTES ou des représentants de monnaies locales européennes (Italie, Espagne…) (ou autres). En France, en 2019, il n’existait pas moins de 82 monnaies locales complémentaires (Blanc et coll., 2020). Pouvant être définies comme des dispositifs monétaires au service d’une transformation socioéconomique (Blanc 2018), ces MLC sont encadrées par la loi relative à l’ESS de 2014. La crise de la Covid-19 a accentué les réflexions concernant l’utilisation et l’utilité de ces dispositifs monétaires. De ce fait, les MLC peuvent être des instruments au service de changements de rapports territoriaux. Elles sont mobilisées à la fois par les citoyennes et citoyens, mais aussi par certaines collectivités publiques (Lyon, ville de Bordeaux…) pour répondre en partie à la relocalisation des échanges économiques et donc de la consommation et de la production.

Lors de cette table ronde, nous nous appuierons sur le Rapport sur l’utilité sociale des monnaies locales complémentaires publié par le Mouvement Sol (2021) pour discuter de l’impact territorial des monnaies locales complémentaires. En effet, selon ce rapport, les MLC constituent un levier transversal de transition dans les territoires et permettent in fine d’en augmenter la résilience2 sur 5 registres : pouvoir citoyen, solidarité, écologie, économie et dynamiques territoriales.

Par exemple, selon Oriane Lafuente-Sampietro (2021) le multiplicateur des monnaies locales est supérieur à celui estimé en monnaie nationale : « Cela signifie que le versement d’un revenu initial de 1 000 € en monnaie locale engendrera 2 000 € de revenus pour le territoire, là où un revenu initial de 1000 € versé en euro ne générera localement que 1 300 € à 1 600 €. » (Mouvement Sol, p. 28).
Les MLC participent également à la résilience écologique en étant un vecteur important de pratiques économiques comme la consommation locale et responsable : selon le rapport, « 48% des répondants particuliers affirment avoir augmenté leur consommation de produits locaux et 36% à consommer davantage de produits bio » (2021, p.21) ou encore « 84% des répondants professionnels disent avoir, depuis leur adhésion à la monnaie locale, adapté leurs méthodes de travail pour réduire leur impact environnemental, par exemple en se tournant vers un fournisseur d’énergie verte » (Mouvement Sol, 2021, p. 22).

Enfin, si les MLC sont articulées aux politiques publiques locales alors elles permettent de garantir que les dépenses effectuées en direction du territoire resteront sur celui-ci : « L’intérêt de la monnaie locale est de garantir à la puissance publique locale qu’une fois dépensé, son argent restera sur le territoire. Il en alimentera les habitants, les entreprises, le tissu associatif et, bien entendu, consolidera les ressources fiscales associées à ces flux monétaires relocalisés » (Mouvement Sol, p 41).

La table ronde sur l’impact territorial des monnaies locales complémentaires (MLC) permettra de discuter des résultats du rapport (Mouvement Sol, 2021), et de partager des expériences d’autres acteurs et actrices de l’ESS ou académiques nationaux et européens. L’idée principale étant de mettre en lumière les synergies possibles afin d’augmenter le pouvoir résilient des MLC sur un territoire donné et ainsi d’améliorer leur crédibilité en tant qu’alternative monétaire légitime.

Références 

BLANC Jérôme, Les monnaies alternatives, Paris, La Découverte, coll. « Repères économie », 127 p., 2018.
BLANC Jérôme, FARE Marie, LAFUENTE-SAMPIETRO Oriane (2020), Les monnaies locales en France : un bilan de l’enquête nationale 2019-20 [Rapport], Lyon, Triangle – UMR 5206, Université Lumière Lyon 2, Sciences Po Lyon.
BOURCART Léo, Émergence et usages du concept de résilience dans les mondes académique et institutionnel, sous la direction de Claude Gilbert. Thèse de doctorat : Sciences politiques : Grenoble Alpes, 2015.
LAFUENTE-SAMPIETRO Oriane, « The multiplier effect of convertible local currencies: case study on two French schemes », 2021.
MOUVEMENT SOL, Monnaies locales : monnaies d’intérêt général. Étude sur l’utilité sociale des monnaies locales complémentaires, Rapport, 2021.

1 Le Mouvement Sol est un laboratoire d’expérimentations monétaires.

2 Le concept de résilience renvoyant à la capacité des territoires à absorber des perturbations économiques, écologiques, voire sociales, en se réorganisant ou transformant (Bourcat, 2015).