Le 4 mars, le Cannabis Social Club de Tours déposera son statut à la préfecture d’Indre-et-Loire, ouvrant une brèche vers la régulation de ces coopératives du cannabis, destinées à la consommation personnelle. Le gouvernement devra alors réagir à propos de cette initiative, dont l’objectif est de lutter contre le commerce illicite de cannabis.


C’est dans une stratégie pour le moins osée que s’est officiellement lancée la Fédération des Cannabis Social Clubs Français ce dimanche 3 février : le 4 mars prochain à Tours, l’association déposera ses statuts à la préfecture d’Indre-et-Loire. Le gouvernement aura dès lors jusqu’au 25 mars pour réagir, sans quoi il devra faire face à une vague de déclarations officielles de Cannabis Social Clubs dans toute la France. Plus de 400 associations prêtes à se déclarer Officieusement, les cannabis clubs existent déjà sur tout le territoire. Plusieurs milliers de consommateurs de cannabis mutualisent ainsi leurs moyens de production afin de satisfaire leur consommation personnelle et court-circuiter ainsi les réseaux de distribution criminels. « Plus le nombre de consommateurs assurant leur propre production sera grand, moins il y aura de trafic, explique simplement Dominique Broc, porte-parole du Cannabis Social Club Français, au Huffington Post. 425 clubs se tiennent prêts [pour] le 25 mars, et pourraient être suivis d’une seconde vague similaire. » « On est tous solidaires, poursuit Dominique Broc. S’il y en a un qui trinque, la logique veut qu’on trinque tous, [c’est-à-dire les 5700 individus prêts à se déclarer officiellement en tant que membre d’un Cannabis Social Club, ndlr]. Soit ils fermeront les yeux et ce serait un accord tacite de la part du gouvernement, soit ils devront s’attaquer à nous, et cela fera beaucoup de monde dont il faudra s’occuper. » Les Cannabis Social Clubs déjà autorisés par l’Europe Cette logique, qui s’inscrit dans un acte délibéré de désobéissance civile, est donc censée amener le gouvernement à trancher sur ces associations. Et Dominique Broc compte bien sur une décision cadre de l’Union européenne pour lui venir en aide. En effet, un texte affirme que « les États membres garantissant que la culture de plantes de cannabis, effectuée illégalement, est un délit punissable », elle précise cependant que « leurs auteurs [qui] s’y livrent exclusivement à des fins de consommation personnelle » ne sont pas concernés par cette décision. Aux yeux de l’Europe, les Cannabis Social Clubs sont légaux et ne peuvent être considérés comme du trafic de drogue. C’est notamment pourquoi ils existent déjà officiellement en Espagne ou au Portugal. Pas de légalisation ni de dépénalisation, mais une régulation Selon le rapport annuel de l’Observatoire européen des drogues et des toxicomanies, les Français sont les quatrièmes consommateurs de cannabis, avec notamment une personne sur trois ayant déjà essayé cette substance, et presque un jeune sur deux dans la tranche des 15-34 ans. D’autre part, trois millions de personnes consommeraient du cannabis quotidiennement en Europe. Pour autant, les Cannabis Social Clubs ne s’inscrivent pas dans une logique de légalisation, mais de « régulation de la consommation. » Cette nuance tient du fait que l’objectif premier de cette initiative n’est pas de combattre le gouvernement, mais le crime organisé, et de connaître exactement la provenance et la composition des substances. « Personnellement, je ne suis pas pour une légalisation totale du cannabis, je suis même contre les coffee shops, assurait il y a peu Dominique Broc à La Nouvelle République. L’intérêt de nos clubs, c’est que nous sommes de petites structures. Moi je cultive pour une quinzaine de personnes, c’est le maximum. Ce sont essentiellement des connaissances, il faut une relation de confiance. On peut réguler notre consommation, alerter une personne si on voit qu’elle fume un peu trop… Nous interdisons l’accès aux mineurs, notre objectif est de faire de la prévention. » Reste à savoir si l’État sera sensible à cette logique et autorisera une prolifération contrôlée des Cannabis Social Clubs.